La médiation commerciale internationale, vers de nouvelles perspectives ?

Face aux bouleversements commerciaux majeurs engendrés par la pandémie, le besoin de recourir à des modes de résolution rapides des différends se trouve accru.

La « Convention des Nations Unies sur les accords de règlement internationaux résultant de la médiation » est entrée en vigueur au milieu de ce chaos mondial, le 12 septembre 2020. Également connue sous le nom de « Convention de Singapour », son objectif premier est d’encourager le recours à la médiation commerciale internationale.

 

  • La Convention de Singapour, un pas capital vers le développement de la médiation commerciale internationale

Ce nouvel instrument international ne prétend pas uniformiser la procédure applicable en matière de médiation mais s’attache plutôt au résultat de ce processus, à savoir l’accord de règlement.

En effet, le texte vise essentiellement à garantir l’efficacité internationale des accords de règlement.

Pour y parvenir, la Convention pose deux nouveaux principes :

Dans un premier temps, elle pose un principe général d’exécution des accords de règlement.
Ce principe permet de faire exécuter les transactions issues d’une médiation internationale, dans un autre État que celui où elles ont été conclues, et selon les règles de procédure en vigueur dans l’État où l’exécution est demandée.

Ainsi, les parties peuvent dorénavant demander l’exécution de leur accord directement dans tout autre État partie à la Convention.

Ce régime d’exécution international comparable à celui d’une sentence arbitrale ou d’un jugement étranger, constitue finalement un traitement de faveur qui se justifie par la nature de l’accord de règlement. En effet, même s’il reste un contrat, il vise principalement à régler un différend et présente donc nécessairement une dimension juridictionnelle.

Dans un second temps, la Convention pose un principe de reconnaissance des accords de règlement.

Ainsi, une partie faisant l’objet d’une action judiciaire peut se reposer sur l’accord de règlement pour contester la demande et prouver que la question a déjà été réglée dans le cadre de celui-ci.

Les accords de règlement se voient ainsi accorder une autorité dans les États parties en dehors de toute procédure d’exécution.

La Convention de Singapour, par ces apports décisifs, a pour but d’établir un cadre juridique harmonisé en matière de médiation, ce qui serait un pas capital vers la promotion de la médiation à l’échelle mondiale.

Son ambition est d’être le pendant de la Convention de New-York pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères, qui a permis de faciliter considérablement le développement de l’arbitrage commercial international.

Mais nous en sommes loin, le développement de la convention s’avère en pratique contrarié.

 

  • La Convention de Singapour, un développement contrarié par le refus de signer de l’Union européenne

Si des nations importantes comme les États-Unis, la Chine, l’Inde (voir la liste des États signataires) ont accepté de ratifier la Convention de Singapour, l’Union européenne tarde à signer.

Ce retard s’explique principalement par le fait que l’Union européenne jouissait déjà de traditions de médiation commerciale bien établies au moment de l’entrée en vigueur de la Convention.
En effet, elle a adopté le 21 mai 2008, une directive n°2008/52/CE portant sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale, qui facilite l’exécution des accords écrits issus de la médiation dans l’espace européen.

L’Union européenne craint que la signature de la Convention lui impose des contraintes supplémentaires – le texte exigeant notamment d’apporter la preuve que l’accord de règlement « est issu d’une médiation », ce qui ne peut être fait qu’à l’aide de la signature du médiateur sur ledit accord ou à l’aide de l’attestation de l’institution qui a administré la médiation.

Pour l’instant, l’ambition de la Convention de Singapour est donc compromise par la résistance de l’Union européenne, mais elle est un instrument de référence pour de nombreux autres Etats qui l’ont ratifiée.

 

Anne MESSAS
Avocate

Mathilde GENESTE
Élève-Avocate