30
mars
2021
Rencontres (amoureuses) et ruptures (contractuelles) en ligne : combien doit le consommateur qui se rétracte ?
Author:
teamtaomanews
Dans notre série sur la jurisprudence relative aux sites de rencontre (voir déjà ici et là) et dans une décision du 8 octobre 2020, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a répondu à plusieurs questions préjudicielles relatives à l’exercice du droit de rétractation prévu par la directive n° 2011/83/UE lorsqu’il est fait usage de ce droit après le commencement de l’exécution d’un contrat de fourniture de services.
Comme chacun sait, le droit européen (transposé dans le Code de la consommation français) impose aux commerçants en ligne de garantir un droit de rétractation au consommateur internaute qui peut ainsi, sous un certain délai, annuler le contrat sans avoir à se justifier, et se faire rembourser le prix payé. Si le principe est clair pour la plupart des produits, son application est plus délicate en matière d’achat de prestation de services puisque ce service peut avoir commencé à être effectué pendant la période au cours de laquelle le droit de rétractation reste ouvert – ou encore lorsque le contrat prévoit plusieurs types de services distincts.
Le litige d’origine oppose une consommatrice et un site Internet allemand de rencontres, « Parship », proposant classiquement deux types d’adhésion aux utilisateurs : une gratuite et une payante qui permet d’avoir accès à davantage de fonctionnalités, notamment à des résultats de recherche fondés sur un test de personnalité et donc, très probablement, à la pertinence accrue grâce à la personnalisation. La prestation de services proposée comporte donc à la fois un service de test de personnalité et un service de mise en relation avec les autres utilisateurs, qui s’en trouve facilité. Le test de personnalité donne lieu à l’envoi d’un rapport de cinquante pages aux consommateurs « premium ».
La consommatrice avait adhéré à la version premium du contrat pour une durée de douze mois au prix de 523,95 euros, le double de la somme facturée en temps normal (sans que l’on connaisse les raisons de cet écart de prix). Elle a été dument informée de son droit de rétractation et a « demandé » à ce que le service commence, sans attendre l’expiration du délai de rétractation, ce qui est bien sûr la pratique habituelle en matière d’achat d’application ou de comptes premium sur des sites Internet puisque le consommateur souhaite en règle générale pouvoir utiliser ce pour quoi il a payé. La consommatrice a toutefois exercé son droit de rétractation quatre jours plus tard, après avoir reçu le rapport du test de personnalité. L’exploitant du site ne l’a remboursée que partiellement, conservant un montant de 392,96 euros sur les 523,95 initialement payés.
La consommatrice a demandé en justice le remboursement de l’intégralité des montants versés. Face à cette demande, la juridiction allemande a décidé de surseoir à statuer et de poser plusieurs questions préjudicielles à la CJUE, pour savoir, en substance :
Comment calculer le montant qui doit être remboursé, lorsque les prestations commandées ne sont pas exécutées au même rythme et donc que le calcul prorata temporis en est rendu délicat ; et comment calculer ce montant au prorata temporis dès lors que toutes les prestations commandées n’ont pas la même valeur aux yeux du consommateur ;
Quels sont les critères d’appréciation du caractère excessif du montant facturé, en l’espèce le double de ce qui est facturé à d’autres consommateurs ;
Et si l’envoi d’un rapport de test de personnalité constitue la fourniture d’un « contenu numérique » de nature à exclure le droit de rétractation postérieurement à l’envoi.
1/ Le calcul du montant de l’indemnité compensatrice
En principe, lorsqu’un consommateur exerce son droit de rétractation alors que la prestation de services prévue dans le contrat a commencé avant l’expiration du délai d’exercice de ce droit, le consommateur est dans l’obligation de payer une indemnité au professionnel : il s’agit d’assurer un équilibre entre la protection des droits des consommateurs et la compétitivité des entreprises. Cette indemnité ne peut, bien sûr, correspondre à la totalité du prix de la prestation interrompue. Elle doit être proportionnelle « à ce qui a été fourni au consommateur jusqu’au moment où il a informé le professionnel de l’exercice du droit de rétractation, par rapport à l’ensemble des prestations prévues par le contrat et calculée sur la base du prix total convenu dans le contrat ».
Mais ce principe connaît une exception lorsque le contrat prévoit expressément qu’une ou plusieurs des prestations sont fournies intégralement dès le début de l’exécution du contrat, de manière distincte, à un prix devant être indiqué séparément. En d’autres termes, si le contrat avait prévu un prix précis pour le rapport du test de personnalité et un autre prix précis pour les services de mise en relation avec les autres utilisateurs, il aurait été possible de prendre en compte de façon distincte les prix de chacune de ces prestations pour calculer l’indemnité due au professionnel. Mais ce n’était pas le cas en l’espèce.
Ce qui est important de retenir en pratique, c’est que le professionnel qui souhaite éviter d’avoir à rembourser les prestations partielles achevées au début de l’exécution du contrat et avant rétractation devra prévoir et facturer un prix distinct pour cette prestation distincte.
Des discussions pourraient néanmoins s’élever si le prix de la prestation distincte est surévalué : le professionnel pourrait, stratégiquement, surfacturer le prix de la prestation effectuée immédiatement en début d’exécution de contrat et sous-facturer celui du service rendu par la suite, pour n’avoir à rembourser que la plus petite somme possible en cas de rétractation. Cette question est envisagée implicitement par la CJUE, dans un second temps.
2/ Les critères du prix « excessif »
Dans ce litige, la consommatrice avait été facturée par le site deux fois plus que les autres utilisateurs pour la même prestation. Or, la directive n° 2011/83/UE prévoit en son article 14 que, si le prix total est excessif, l’indemnisation appropriée sera calculée sur la valeur marchande de la prestation, qui se définit par comparaison avec le prix pratiqué dans des conditions équivalentes.
La CJUE répond donc qu’il convient de prendre en compte toutes les circonstances permettant d’établir la valeur marchande du prix d’une prestation, notamment celui payé par d’autres consommateurs.
Ainsi, le professionnel qui souhaite se faire indemniser à la suite d’une rétractation du consommateur doit veiller à ce que le prix pratiqué ne soit pas excessif eu égard aux autres prix pratiqués pour des services équivalents, mais peut-être aussi eu égard au bénéfice que tire le consommateur de la réalisation de la prestation partielle : l’utilité pour l’utilisateur d’un site de rencontre d’un test de personnalité conçu pour améliorer ses résultats de recherche est proche de zéro dès lors que l’utilisateur se rétracte de sa commande.
3/ Qualification de « contenu numérique »
Enfin, la CJUE considère que le rapport de test de personnalité, qui semble avoir été remis sous forme de fichier informatique « de cinquante pages », ne constitue pas un « contenu numérique » au sens de la directive et donc que le droit de rétractation s’applique bien.
En effet, il existe une exception au droit de rétractation, cumulativement :
lorsque la fourniture d’un contenu numérique résultant d’une prestation de service s’effectue sous la forme d’une vidéo, d’une application, d’un jeu, d’un texte, etc. (par exemple lorsqu’un commerçant en ligne réalise et fournit une application suivant les indications du client, ce qui ne constitue pas la vente d’un produit mais d’un service personnalisé),
lorsque l’exécution de la prestation a commencé avec l’accord du consommateur, et a fortiori lorsqu’elle est achevée, et enfin
lorsque le consommateur a reconnu qu’il perdra ainsi son droit de rétractation (directive 2011/83/UE, article 16, m)).
Si le rapport de test de personnalité est un « contenu numérique », alors il n’était pas concerné par la rétractation postérieure à son envoi et la valeur marchande de cette prestation devait être entièrement comprise dans l’indemnisation.
Mais la CJUE rappelle que la notion de fourniture d’un contenu numérique est d’interprétation stricte et se définit comme correspondant aux « données qui sont produites et fournies sous une forme numérique, comme les programmes informatiques, les applications, les jeux, la musique, les vidéos ou les textes, que l’accès à ces données ait lieu au moyen du téléchargement ou du streaming, depuis un support matériel ou par tout autre moyen ».
Or, selon la cour, le test de personnalité n’est pas un contenu numérique en ce qu’il permet notamment au consommateur de créer, traiter ou stocker des données au format numérique. Cette solution peut étonner dans la mesure où le test donne lieu à un rapport de cinquante pages, fourni probablement en PDF à la consommatrice : ce document semble bien être un ensemble de données produites et fournies par téléchargement sous une forme numérique textuelle. Mais peut-être la cour a-t-elle estimé qu’il n’y avait pas là un « pur » contenu numérique et que le fichier PDF n’était que l’export des données renseignées par les utilisateurs et traitées par le prestataire de services. Le traitement de ces données, qui semble se poursuivre après l’envoi du rapport, dans le cadre de la prestation de mise en relation avec les autres utilisateurs, n’est effectivement pas récupérable ou consultable par téléchargement ou par streaming.
Bien que la cour propose une explication relativement synthétique de son raisonnement sur la notion de contenu numérique, on peut supposer qu’elle souhaite, en opportunité et en se fondant sur une interprétation « stricte » de la notion de « contenu numérique », conforter la protection des consommateurs et les protéger des conséquences de la qualification de contenu numérique sur leur droit de rétraction.
Ce qu’il faut retenir sur ce point, c’est que le professionnel qui propose, en plus de son service principal, un service annexe pouvant donner lieu à un export téléchargeable, pourra se voir opposer le droit de rétractation sur ce service annexe sans bénéficier de l’exception de l’article 16 m).
Lire la décision en ligne sur Curia
Jérémie LEROY-RINGUET
Avocat à la Cour
Thibault FELIX
Stagiaire – Pôle Avocats
25
mars
2021
Un pacte d’actionnaires peut emporter cession de droits d’auteur
Author:
teamtaomanews
La question de la titularité du droit d’auteur sur les inventions de salariés est récurrente en droit français. Le principe est que l’existence d’un simple contrat de travail n’emporte aucune dérogation au profit de l’employeur à la jouissance des droits de propriété intellectuelle de l’auteur salarié. Ainsi, en l’absence de cession de droits, le salarié ne transmet à son employeur aucune autorisation d’exploitation sur ses œuvres. Mais les choses se compliquent lorsque le salarié est également actionnaire et qu’un pacte d’actionnaire envisageait le sort des œuvres à naître.
La cour d’appel a eu l’occasion de se pencher sur ce problème dans un arrêt du 26 février 2021 relatif à des créations de mode. Le conflit opposait d’une part une société CYMBELINE FOREVER, venant aux droits de la société CYMBELINE, spécialisée dans la commercialisation de robes de mariées, et d’autre part l’ancienne directrice de collection salariée de CYMBELINE, dont le contrat de travail avait trouvé son terme mais qui était toujours actionnaire.
L’ancienne directrice reprochait à la société qui avait repris le fonds de commerce d’avoir commercialisé cinq modèles de robes de mariées créés après la fin de son contrat de travail et dont elle n’avait cédé les droits à personne.
La cour a considéré que l’ancienne directrice de collection prouvait bien sa qualité d’auteur mais qu’elle avait cédé les droits d’exploitation à la société et ne pouvait invoquer une atteinte à ses droits patrimoniaux ; que toutefois l’absence de son nom avait porté atteinte à son droit moral.
Les juges commencent donc par reconnaitre la qualité d’auteur à l’ancienne directrice de collection et l’originalité de ses créations, ce qui justifie, en l’absence de la mention de son nom, une condamnation pour atteinte au droit moral. Ils considèrent ensuite que la titularité des droits patrimoniaux revient à la société CYMBELINE. Pour statuer ainsi, la cour constate que l’ancienne salariée avait signé, en compagnie des fondateurs, un pacte d’actionnaires prévoyant que la pleine propriété des droits de propriété intellectuelle appartenait à la société, mais également que chacun des signataires s’interdisait « à l’avenir de déposer ou de protéger de quelque façon que ce soit, à son nom, directement, indirectement ou par personne interposée, tous droits intellectuels (brevets, marques…) nécessaires ou utiles à l’activité de la Société ». Tout signataire s’engageait également « à déposer et protéger lesdits droits exclusivement au nom de la Société afin que cette dernière puisse en jouir et en disposer librement comme propriétaire ». Ce pacte ayant été conclu pour toute la durée pendant laquelle les signataires sont titulaires de titres et, en tout état de cause, pour une durée de douze années minimum, l’ancienne directrice n’était donc pas en mesure de revendiquer les droits sur ses créations puisqu’elle a « cédé à la société Cymbeline les droits patrimoniaux d’auteur » sur les robes litigieuses. L’ancienne salariée est déboutée de ses demandes à ce titre.
La Cour considère qu’un pacte d’actionnaires contenant un engagement de chacun des associés de ne pas revendiquer la protection de ses créations pour son propre compte vaut preuve de la cession des droits patrimoniaux.
Il s’agit là d’une solution intéressante et très discutable, selon laquelle l’interprétation de la volonté des parties semble devoir l’emporter sur les dispositions légales relatives à la nullité de la cession globale des œuvres futures (Code de la propriété intellectuelle, article L. 131-1) et à l’obligation de constatation par écrit et de façon précise des contrats de transmission des droits d’auteur (article L. 131-2, certes non applicable à la date des faits, et L. 131-3). En effet, si le droit français exige en principe que le contrat de cession énumère précisément les droits cédés et les modes d’exploitation couverts, les juges ont, en l’espèce, considéré que les stipulations relativement sommaires du pacte d’associés valaient transmission.
Une telle solution, qui pourrait donner matière à pourvoi en cassation, invite en tout cas les créateurs actionnaires à surveiller avec toujours plus de vigilance les droits dont ils sont propriétaires, afin d’être en mesure d’en conserver la maîtrise à travers le temps.
Référence et date : Cour d’appel de Paris, pôle 5 – ch. 2, 26 février 2021, n°19/15130
Décision non publiée, communiquée sur demande à contact-avocat@taoma-partners.fr
Retrouvez sous ce lien une autre actualité récente relative au droit de la mode et à la qualité d’auteur des salariés.
Jérémie LEROY-RINGUET
Avocat à la Cour
Mathilde GENESTE
Élève-avocate
23
mars
2021
Un employeur bien dans ses baskets de créateur
Author:
teamtaomanews
Selon une formule attribuée à Coco Chanel, « la mode se démode ; le style, jamais ». La mode se fait et se défait au gré des créations nouvelles. Les créateurs de ces réalisations ne se contentent pas de transformer des tissus en vêtements mais créent des objets qui ont un sens pour ceux qui les portent. Inspirée et créative, la mode n’est donc pas seulement une activité commerciale, mais une activité artistique à part entière, justifiant que les créateurs puissent être considérés comme des artistes.
Pour autant, la reconnaissance de la qualité d’auteur d’un styliste salarié n’est pas toujours évidente, notamment en cas de création collective. La Cour d’appel de Paris a eu l’occasion de le rappeler dans un arrêt rendu le 5 mars 2021 opposant la société COMPTOIR DES COTONNIERS à l’un de ses salariés.
Le salarié en cause revendiquait la création, en septembre 2014, d’une paire de baskets vintage dénommée « Slash », de sa semelle léopard et de son sac d’emballage. Les juges de première instance l’ont déclaré irrecevable à agir au titre du droit d’auteur faute pour lui de justifier être à l’origine de la création.
En seconde instance, la Cour rappelle qu’il incombe à celui qui entend se prévaloir du droit d’auteur de rapporter la preuve d’une création déterminée à une date certaine et de caractériser l’originalité de la création – l’existence d’un contrat de travail n’étant pas exclusive de cette protection.
En l’occurrence, si le salarié prétend être, depuis son recrutement, le seul styliste de la société en charge des accessoires, les juges constatent que son contrat de travail le rattache à une équipe créative et à une directrice artistique.
La cour examine avec une grande précision les pièces, et notamment les attestations produites aux débats et en déduit que l’autonomie créatrice du salarié était restreinte et que, bien qu’il ait réalisé seul le croquis de la basket, il a agi « sous la subordination » de la directrice en charge de définir et de mettre en œuvre la ligne stylistique.
La Cour observe ensuite que la basket a été présentée dans la presse comme une création de la directrice de style, sans que le salarié ne s’y oppose et sans que celui-ci ne s’oppose non plus au dépôt par son employeur auprès de l’INPI d’une demande de protection au titre des dessins et modèles.
Toutes ces observations réunies, le salarié est déclaré irrecevable en son action en contrefaçon.
La Cour d’appel, sans pour autant énoncer une solution nouvelle, rappelle donc qu’un salarié qui prend part à un processus collectif de création sous la supervision d’une directrice artistique peut ne pas être en mesure de revendiquer la qualité d’auteur s’il ne justifie pas qu’il disposait de libertés de choix esthétiques et de création ne faisant pas l’objet de restrictions et d’encadrement en raison du contrôle d’un supérieur.
Les juges précisent ainsi les contours de la distinction essentielle qui existe entre le fait de participer à un processus créatif et celui de le maîtriser.
Cette question du cumul des qualités d’auteur et de salarié est source de nombreux contentieux depuis des décennies. La présente décision s’inscrit dans une tendance jurisprudentielle qui restreint la possibilité pour des salariés d’obtenir la reconnaissance de leur qualité d’auteur et donc un complément de rémunération au titre de leurs droits patrimoniaux. Par exemple, dans l’arrêt Lavigne c. GIM (Cass. Soc. 19 oct. 2005, n°03-42.108) rendu en 2005 par la chambre sociale de la Cour de cassation, les juges avaient décidé d’appliquer la notion d’œuvre collective aux créations d’entreprise auxquels les salariés avaient participé et considéré que les droits issus de ces créations étaient nés directement sur la tête de l’entreprise – une qualification qui n’a toutefois pas été discutée dans l’arrêt commenté.
La jurisprudence invite donc à demeurer vigilant quant à la détermination au quotidien des droits des collaborateurs qui participent à des créations.
Référence et date : Cour d’appel de Paris, pôle 5, chambre 2, 5 mars 2021, n° 19/17254
Décision non publiée, communiquée sur demande à contact-avocat@taoma-partners.fr
Retrouvez sous ce lien une autre actualité récente relative au droit de la mode et à la qualité d’auteur des salariés.
Alain HAZAN
Avocat à la Cour – Associé
Mathilde GENESTE
Élève-Avocate
19
mars
2021
Classement Décideurs/LeadersLeague 2021 : TAoMA Partners à nouveau distingué
Le Classement Décideurs/LeadersLeague 2021 met, cette année encore, les équipes de TAoMA Partners à l’honneur en distinguant le cabinet dans 7 catégories :
« Excellent »
Propriété Intellectuelle – Marques, dessins & modèles – Cabinet de conseils en PI
« Forte notoriété »
Propriété Intellectuelle – Marques, dessins & modèles – Cabinet d’avocats
Propriété Intellectuelle – Gestion de portefeuilles Marques, dessins & modèles – Cabinet d’avocats
Média & Divertissement – Droit de la presse – Cabinet d’avocats
« Pratique réputée »
Marketing, communication & digital – Droit de la publicité et du marketing – Cabinet d’avocats
Média & Divertissement – Droit du cinéma – Cabinet d’avocats
Technologies, internet & Télécommunications – Droit des données personnelles – Cabinet d’avocats
Nous souhaitons remercier nos clients et partenaires pour leurs recommandations et leur confiance.
18
mars
2021
Campagne télévisée de ventes promotionnelles : Lidl dans le viseur des enseignes Intermarché et Carrefour
Author:
teamtaomanews
La guerre dans le secteur de la grande distribution fait rage et les deux arrêts rendus par la Cour de Cassation le 16 décembre 2020 [1] en sont le parfait exemple.
Les enseignes Intermarché et Carrefour reprochaient à l’enseigne Lidl d’avoir fait, au cours des années 2015 et 2016, la promotion télévisée de ventes promotionnelles, pratique pourtant interdite par les dispositions du décret relatif à la prohibition des publicités télévisuelles pour des ventes promotionnelles du secteur de la distribution (Article 8 du décret n°92-280 du 27 mars 1992) [2].
La Cour d’Appel de Paris avait, par deux arrêts datés de 2019, reconnu que les actes de la société Lidl étaient contraires aux textes précités et l’avait ainsi condamnée pour pratiques commerciales déloyales.
Or, c’était sans compter sur la ténacité du discounter qui se pourvu alors en cassation. Outre le quantum de la condamnation, la société Lidl remettait également en cause la conformité du décret n°92-280 à la Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales, ainsi que la qualification de ventes promotionnelles.
La Cour de Cassation, par ces deux arrêts en date du 16 décembre 2020, rejette les moyens de la société Lidl au soutien de ces pourvois.
D’une part, la Cour de Cassation retient que l’objectif de l’interdiction édictée par le décret n°92-280 n’est pas de protéger le consommateur mais de préserver l’attractivité des différents médias par rapport à la télévision, afin que la publicité de la grande distribution, qui constitue une source importante de revenus, ne se concentre pas sur les régies publicitaires de chaines de télévision.
Aussi, le décret n°92-280 n’entrant pas dans le champ d’application de la Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales, il n’y avait pas lieu d’examiner sa conformité à ladite Directive et, par voie de conséquence, son applicabilité.
D’autre part, et sur la qualification de vente promotionnelle, la Cour de Cassation relève que les cinq produits mis en avant dans les spots télévisés diffusés par Lidl en avril, mai et juin 2016 n’étaient plus offerts à la vente dans aucun des quatre magasins Lidl visités par les huissiers de justice le 19 juillet 2016.
De même, dans les vingt-deux magasins visités par les huissiers de justice le 8 décembre 2015, la très grande majorité des produits mis en avant dans les spots diffusés de septembre à novembre 2015, étaient absents des rayons des magasins visités.
Or, selon la doctrine de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, doivent être qualifiées de promotions, les opérations caractérisées par une exposition à la vente en magasin inférieures à quinze semaines.
D’autres éléments factuels ont, par ailleurs, convergé vers une qualification de ventes promotionnelles et, notamment, le fait que :
l’essentiel des ventes étaient intervenues dans les deux à quatre premières semaines de commercialisation ;
le niveau de stock était quasiment atteint à l’issue de la quatrième semaine de vente ;
aucun réassort n’avait été effectué à l’issue de la quatrième semaine de commercialisation.
La Cour de cassation confirme donc l’analyse des juges du fond qui ont retenu que les opérations commerciales litigieuses en question étaient des opérations de promotion dont la publicité par voie de télévision était interdite par l’Article 8 du décret n°92-280 du 27 mars 1992.
La société Lidl est ainsi condamnée à réparer le préjudice résultant de ces pratiques commerciales déloyales à hauteur de 9,7 millions d’euros.
Cette nouvelle condamnation s’ajoute à une longue liste d’affaires impliquant le discounter d’origine allemande, dont une décision récente des tribunaux espagnols qui l’a condamné pour contrefaçon du brevet Thermomix de la société allemande Vorweck pour son robot CUISINE CONNECT. Une procédure identique est actuellement pendante devant les tribunaux français et nous ne manquerons pas de vous faire part de son issue dans le cadre d’une prochaine TAoMA News.
Dorian Souquet
Juriste Stagiaire
Baptiste Kuentzmann
Juriste
[1] Cour de Cassation, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 19-16.760 – Cour de Cassation, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 19-12.820.
Décision non publiée, communiquée sur demande à contact-cpi@taoma-partners.fr
[2] Article 8 du décret n°92-280 du 27 mars 1992 : « Est interdite la publicité concernant, d’une part, les produits dont la publicité télévisée fait l’objet d’une interdiction législative et, d’autre part, les produits et secteurs économiques suivants : (…) – distribution pour les opérations commerciales de promotion se déroulant entièrement ou principalement sur le territoire national, sauf dans les départements d’outre-mer et les territoires de la Polynésie française, des îles Wallis et Futuna, dans la collectivité départementale de Mayotte et en Nouvelle-Calédonie. Au sens du présent décret, on entend par opération commerciale de promotion toute offre de produits ou de prestations de services faite aux consommateurs ou toute organisation d’événement qui présente un caractère occasionnel ou saisonnier, résultant notamment de la durée de l’offre, des prix et des conditions de vente annoncés, de l’importance du stock mis en vente, de la nature, de l’origine ou des qualités particulières des produits ou services ou des produits ou prestations accessoires offerts »
04
mars
2021
Éditeurs de sites => Mars 2021 : priorité cookies !
Author:
teamtaomanews
En octobre 2020, la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) a publié de nouvelles lignes directrices ainsi qu’une recommandation concernant les obligations des entités déposant ou lisant des cookies sur les terminaux des internautes. Consciente des importants changements engendrés, elle a prévu une période d’adaptation de 6 mois pour permettre aux acteurs concernés de se mettre en conformité.
Cette période transitoire s’achèvera donc le 31 mars 2021, date à laquelle tous les sites devront être en conformité avec les nouvelles règles, sachant que la CNIL a déjà annoncé que leur respect ferait partie (avec la cybersécurité et la sécurité des données de santé) de ses thématiques prioritaires de contrôle pour l’année !
Concrètement, qu’est-ce que cela implique ?
La CNIL vérifiera, dès le mois d’avril, par le biais de contrôles qui pourront être réalisés en ligne, si les nouvelles règles concernant l’utilisation des cookies, y compris les nouvelles modalités de recueil du consentement, sont bien appliquées.
Quels sont les grands principes posés par la CNIL concernant les cookies ?
=> Une information claire et complète doit être fournie aux internautes concernant l’identité du ou des responsables de traitement des opérations de lecture ou écriture, les finalités des traceurs et les conséquences de leur refus ou acceptation ;
=> À part quelques exceptions (cookies destinés à garder en mémoire un panier d’achat, cookies permettant aux sites payants de limiter l’accès gratuit à un échantillon de contenu, etc.) le dépôt et la lecture de cookies sont soumis au consentement des internautes ;
=> Le consentement doit être recueilli par un acte clair comme une case à cocher sur une bannière (la poursuite de la navigation sur un site web ou le paramétrage du navigateur web ne valent pas, à ce jour, consentement) ;
=> Le consentement doit être aussi simple à retirer qu’à accorder ;
=> Les sites Internet utilisant des traceurs doivent être en mesure de fournir la preuve du recueillement du consentement à tout moment.
Avis aux retardataires : il n’est pas trop tard pour mettre en œuvre ces mesures d’ici la fin du mois !
Thibault FELIX
Stagiaire Pôle Avocat
Anita DELAAGE
Avocate à la Cour
Lire les communiqués de la CNIL :
https://www.cnil.fr/fr/cookies-la-cnil-incite-les-organismes-prives-et-publics-auditer-leurs-sites-web-et-applications
https://www.cnil.fr/fr/cybersecurite-donnees-de-sante-cookies-les-thematiques-prioritaires-de-controle-en-2021