18
juillet
2024
Jugement éclair : pas de contrefaçon pour le sac DEMI-LUNE
Author:
TAoMA
Le 7 juin 2024, le Tribunal judiciaire de Paris a rendu une décision dans une affaire opposant la société Atelier de Production et de Création (APC) aux sociétés Monoprix et Monoprix Exploitation concernant des faits de contrefaçon de droit d’auteur, de modèle déposé, ainsi que des faits distincts de concurrence déloyale et parasitaire.
La société APC, ayant déposé le 14 octobre 2013 un modèle de sac nommé « DEMI-LUNE », qui a rencontré un grand succès en France et à l’étranger, a constaté que les sacs commercialisés par les sociétés Monoprix reproduisaient les caractéristiques originales et l’impression d’ensemble de ce sac, incluant « sa forme et ses proportions ainsi que celles de la bandoulière », mais reprenaient également l’empreinte de la personnalité de son auteur.
De plus, la société APC a affirmé, devant le Tribunal, que la commercialisation de ces copies serviles générait un risque de confusion, constituant ainsi des actes de concurrence déloyale.
En conséquence, la société APC a mené des opérations de saisie-contrefaçon et a fait assigner les sociétés Monoprix pour faire cesser la production et la commercialisation de ces produits et obtenir réparation des préjudices commerciaux subis.
LA DÉFENSE DES PARTIES MISES EN CAUSE
Les sociétés Monoprix ont contesté les accusations émises par la société APC en invoquant que :
– le modèle « DEMI-LUNE » déposé par la société APC et les produits qu’elles commercialisent comportent des différences importantes.
– le sac « DEMI-LUNE » n’est pas original au motif que les caractéristiques revendiquées sont inhérentes à la forme du sac et parfaitement connues dans cette industrie (notamment aux vus des antériorités).
– la vente d’un produit similaire n’est pas nécessairement constitutive d’un acte de concurrence déloyale en ce qu’ils visent des consommateurs différents et utilisent des canaux de distribution différents.
Modèle déposé par la société AP
Modèle antérieur
DÉCISION DU TRIBUNAL
Après avoir tranché sur la validité du modèle de sac « DEMI-LUNE » en faveur de la société APC, le Tribunal s’est penché sur la possible contrefaçon du modèle, la violation des droits d’auteur et la présence d’actes de concurrence déloyale et parasitaire.
Tout d’abord, il a conclu que la comparaison des modèles des deux parties n’indiquait aucune contrefaçon, ces derniers se distinguant par « des éléments visuellement importants ».
Ensuite, il a évalué que les caractéristiques revendiquées par la société demanderesse relevait d’un « travail stylistique de qualité mais non un effort créatif concrétisé par une apparence singulière qui viendrait révéler l’empreinte de la personnalité » et refuse donc la qualification d’œuvre originale protégée par le droit d’auteur pour le modèle de sac « DEMI-LUNE ».
Enfin, sur la question de la concurrence déloyale et parasitaire, le tribunal a admis une ressemblance élevée pour certains des modèles des sociétés Monoprix mais a refusé la qualification de copie servile. Il a ajouté, en outre, que les faits n’avaient pas été réitérés. À cet égard, il a admis une « absence de risque de confusion pour la clientèle entre les modèles « DEMI-LUNE » de la société APC et les modèles « DEMI-LUNE » des sociétés Monoprix » écartant ainsi la caractérisation d’acte de concurrence déloyale et parasitaire, la société APC n’ayant pas démontré des investissements significatifs ou une notoriété suffisante pour établir un acte de parasitisme.
Ce jugement du Tribunal judiciaire de Paris renforce ainsi les exigences de protection de création – une création peut valablement être protégée par le biais d’un dessin & modèle tout en se voyant refuser une protection au titre du droit d’auteur. De plus, le Tribunal éclaircit les limites des pratiques de concurrence au sein de l’industrie.
L’affaire n’était finalement pas dans le sac pour APC.
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Elsa OLCER
Juriste Stagiaire
Jean-Charles NICOLLET
Conseil en Propriété Industrielle Associé
(1) Tribunal judiciaire de Paris, 3e ch., 2e sect., 7 juin 2024, n° 21/15173
18
juin
2024
Le papier peint fonce droit dans le mur !
Par une décision en date du 25 avril 2024, le Tribunal judiciaire de Paris a reconnu l’existence de droits d’auteur sur différents motifs de papiers peints créés par une artiste plasticienne. Cela étant, malgré la reconnaissance de ces droits d’auteurs, l’artiste a été déboutée de son action en contrefaçon initiée à l’encontre d’une société hollandaise qui proposait un papier peint prétendument contrefaisant1.
Les motifs de papiers peints peuvent bénéficier d’une protection par le droit d’auteur sous réserve de leur originalité.
Conformément aux dispositions du Code la propriété intellectuelle2, une œuvre de l’esprit peut revêtir différentes formes, dont notamment « 7° Les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie (…) ». Néanmoins, pour que cette œuvre de l’esprit bénéficie d’une protection par le droit d’auteur, encore faut-il qu’elle soit originale.
En l’occurrence, Madame G, artiste plasticienne, a créé une collection de papiers peints parmi lesquels un décor mural intitulé « White Spirit ». Toutefois, Madame G a eu la désagréable surprise de constater que son distributeur proposait à la vente un papier peint blanc produit par la société hollandaise Eijffinger BV qui, selon elle, présentait notamment des ressemblances avec son modèle emblématique.
Sur cette base, elle a assigné la société Eijffinger BV, notamment en contrefaçon de droit d’auteur, devant le Tribunal judiciaire de Paris.
Classiquement, la société Eijffinger BV s’est défendu en invoquant le défaut d’originalité des motifs de papiers peints invoqués et, partant, l’absence de protection par le droit d’auteur.
Le Tribunal judiciaire de Paris rejette ce moyen de défense et considère que les motifs de papiers peints sont originaux. En particulier, il est jugé que l’artiste a superposé de manière arbitraire des formes ou modules graphiques monochromes découpées au cutter dans du papier, ce qui confère à l’ensemble une impression en trois dimensions.
Le Tribunal judiciaire de Paris ajoute que les caractéristiques telles que citées ci-dessus ne se réduisent pas à une simple idée ou à un simple savoir-faire mais traduisent manifestement l’empreinte de la personnalité de l’auteur : « l’illusion d’optique ainsi créée par la mise en relief des formes géométriques découpées et le jeu d’ombre portée évoquent la représentation d’une sculpture de papier, dans une esthétique qui s’avère singulière s’agissant d’une tapisserie murale ».
Le modèle de papier peint « White Spirit », se voit ainsi accorder une protection au titre du droit d’auteur.
La société Eijffinger BV ne se rend toutefois pas coupable d’actes de contrefaçon des motifs de papiers peints de Madame G
Si l’originalité des motifs de papiers peints est admise, il en va différemment de la contrefaçon de ces derniers par la société Eijffinger BV.
En effet, après une analyse détaillée des modèles en cause, le Tribunal judiciaire de Paris considère que les caractéristiques essentielles du modèle de papier peint « White Spirit » ne se retrouvent pas au sein des modèles argués de contrefaçon.
Selon le Tribunal judiciaire de Paris, les modèles litigieux ne représentent pas une superposition, sur différents niveaux, de formes ou modules graphiques découpés dans du papier et superposés pour restituer une impression visuelle de profondeur en trois dimensions.
Partant, la contrefaçon n’est pas caractérisée et Madame G est déboutée de ses demandes.
Il convient de noter que Madame G est également déboutée de ses autres demandes, notamment sur la base de la concurrence déloyale et du parasitisme. De même, Madame G se voit refuser une protection au titre du droit d’auteur de ses autres modèles eu-égard à leur absence d’originalité.
Cette décision rappelle, une fois de plus, les conditions de protection d’une œuvre quelle qu’elle soit, par le droit d’auteur. Toutefois, si cette protection est reconnue, encore faut-il que les actes de contrefaçon soient caractérisés, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
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Baptiste Kuentzmann
Conseil en Propriété Industrielle
1) Tribunal judiciaire de Paris, 3ème chambre, 1ère section, 25 avril 2024, n° 23/04554
2) Article L112-2 du Code de la propriété intellectuelle
28
mai
2024
Spoiler Alert ! L’immatriculation d’une société ne présume pas l’exploitation commerciale de sa dénomination sociale
Le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 27 mars 20241 vient préciser les contours de l’usage dans la vie des affaires d’une dénomination sociale. La simple immatriculation d’une société est-elle, en soi, constitutive d’un usage dans la vie des affaires de sa dénomination sociale ?
L’usage dans la vie des affaires : une notion centrale en droit des marques
Lorsque le titulaire d’une marque n’a pas autorisé l’usage par un tiers, dans la vie des affaires, d’un signe identique ou similaire à celle-ci, et pour des produits ou services identiques ou similaires, alors il s’agit d’une contrefaçon2.
Une société ne peut donc pas faire usage d’une dénomination sociale identique ou similaire à une marque antérieure, si les produits ou services relatifs à son activité sont identiques ou similaires à celle-ci (sauf à prouver la renommée de cette marque, bien sûr). Or, en l’espèce, la marque antérieure portait sur le signe « Mix Beauty » et la dénomination sociale immatriculée postérieurement à son enregistrement portait sur un signe strictement identique.
Cependant, pour porter atteinte à la marque antérieure, l’usage de la dénomination sociale doit être réalisé « dans la vie des affaires ». Le tribunal judiciaire de Paris rappelle donc trois décisions fondamentales du Tribunal et de la Cour de justice de l’Union européenne précisant ces notions :
• « Faire usage » d’un signe signifie que son utilisation est faite dans le but de distinguer des produits ou des services. Ainsi, l’utilisation de la dénomination sociale doit porter atteinte, ou être susceptible de porter atteinte aux fonctions essentielles de la marque antérieure3.
• Les termes « usage dans la vie des affaires » ne sauraient être interprétés en ce sens qu’ils visent uniquement des relations immédiates entre un commerçant et un consommateur. Ainsi, il y a usage dans la vie des affaires lorsque l’opérateur économique concerné utilise cette dénomination sociale dans le cadre de sa propre communication commerciale4, ou lorsque cet usage se situe dans le contexte d’une activité commerciale visant un avantage économique5.
Le titulaire de la marque antérieure doit donc démontrer que l’usage de la dénomination sociale litigieuse est réalisé dans le contexte de la vie des affaires, et qu’en cela, il porte atteinte aux fonctions essentielles de la marque.
La simple immatriculation d’une société sous une certaine dénomination n’est pas une présomption d’usage dans la vie des affaires
En l’espèce, les demandeurs n’avaient produit qu’une seule pièce aux débats, à savoir l’extrait Kbis de la société Mix Beauty. Ce document ne fait qu’établir l’enregistrement de cette société sous la dénomination « Mix beauty » auprès du registre du commerce et des sociétés de Paris.
Or, pour le tribunal, ce seul document n’est pas suffisant pour prouver un usage dans la vie des affaires de la dénomination « Mix Beauty ». En effet, il considère que le seul fait d’immatriculer une société sous une certaine dénomination n’est pas, en lui-même, un usage de cette dénomination dans le but de distinguer des produits ou services. Par conséquent, cette seule immatriculation n’est pas susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque.
Le tribunal conclut en ces termes « il s’agit d’un acte dont l’effet est strictement juridique, qui ne caractérise pas en soi l’existence d’une activité, et il ne peut être présumé que, du seul fait qu’une société existe sous une dénomination, elle est exploitée sous cette même dénomination ». Les demandeurs avaient pourtant produit des attestations établissant des confusions entre les adresses, notamment par des candidats dans le cadre de campagnes de recrutement. Mais ce n’est pas suffisant pour les juges pour qui l’atteinte à la marque « Mix Beauty » n’est pas établie.
Ce jugement est l’occasion de rappeler un principe fondamental en matière de procédure civile ; le juge ne peut suppléer la carence des parties dans l’administration de la preuve des faits qu’elles allèguent. Il est donc opportun de produire un maximum de documents établissant un usage de la dénomination sociale dans la vie des affaires, tels que des documents commerciaux par exemple. Ou de mettre la société sous surveillance et d’attendre les premiers actes d’usage et les faire constater.
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Anne Messas
Avocate associée
Juliette Descamps
Élève-avocate
(1) TJ Paris, 3e ch., 3e. sect., 27 mars 2024, n°23/13398
(2) Article L 713-2 du code de la propriété intellectuelle
(3) CJUE, 25 juillet 2018, Mitsubishi, C-129/17, point 34
(4) CJUE, 16 juillet 2015, TOP Logistics e.a., C-379/14, points 40 et 41
(5) TUE, 3 mars 2016, Ugly Inc. c/ OHMI et Group Lottus Corp., T-778/14, point 28
21
mai
2024
Le tabouret Tam Tam, une protection qui tient debout devant la Cour d’appel
Author:
TAoMA
Dans un arrêt du 22 février 2024, la Cour d’appel de Lyon a confirmé le caractère original du tabouret « TAM TAM » et condamné les sociétés LaFoir’Fouille et FF Digital en contrefaçon de droit d’auteur et en concurrence parasitaire.
La société Stamp, détentrice des droits d’auteur sur le célèbre tabouret « Tam Tam » conçu en 1968 par le designer Henry Massonnet, a assigné en contrefaçon de droit d’auteur et en concurrence déloyale les sociétés La Foir’Fouille et FF Digital pour avoir reproduit et commercialisé des modèles de tabourets reprenant les caractéristiques du tabouret « Tam Tam », et pour avoir réalisé une campagne publicitaire faisant directement écho à son produit.
En première instance, le Tribunal judiciaire de Lyon a reconnu le caractère original du tabouret « Tam Tam » et sa protection au titre du droit d’auteur. Toutefois, la société Stamp a été déboutée de ses demandes indemnitaires au titre de la contrefaçon, le Tribunal estimant que les preuves apportées n’étaient pas suffisantes pour établir l’imitation ou la reproduction des caractéristiques originales du tabouret par les défenderesses.
Après s’être ménagée de nouveaux moyens de preuves, la société Stamp a eu gain de cause en appel.
En effet, la Cour d’appel de Lyon a réaffirmé que le caractère original du tabouret « Tam Tam » tenait dans la combinaison spécifique de trois éléments :
• Sa forme en diabolo ;
• L’emploi de la matière plastique ;
• Les parties jumelles démontables et emboîtables.
Elle souligne que cette combinaison d’éléments ne répond pas à des contraintes techniques, et qu’au contraire, elle reflète bel et bien la personnalité de l’auteur.
Ainsi, sur la base des nouveaux éléments de preuves produites par l’appelante, elle condamne les sociétés La Foir’Fouille, FF Digital et Directusine (fabricante du produit) en contrefaçon de droit d’auteur.
S’agissant de la concurrence parasitaire, la Cour a jugé que la référence directe au tabouret « Tam Tam » dans le slogan publicitaire des intimées, constituait « l’une des déclinaisons les plus pures qui soient du comportement parasitaire ». En effet, les intimées utilisaient l’argument publicitaire suivant « 5 euros le tabouret, vous n’aurez qu’à dire que vous l’avez acheté dans une boutique design ».
Cet arrêt rappelle qu’il n’est pas possible de copier impunément les créations d’autrui, et personne n’en tombera de sa chaise.
Delphine Monfront
Avocate à la Cour
19
mars
2024
Packaging alimentaire et droit d’auteur : le Tribunal n’est pas emballé
Author:
TAoMA
Le 8 février 2024, le Tribunal judiciaire de Paris a rejeté l’action intentée par la société Aphinitea Corporation, sur les fondements de la contrefaçon de droit d’auteur et de la concurrence déloyale, contre la société First FFC en raison de la reproduction d’un modèle d’emballage alimentaire baptisé « Magnolia ».1
Un emballage alimentaire peut constituer une œuvre protégée par le droit d’auteur, sous réserve d’en démontrer l’originalité.
Tout d’abord, le tribunal rappelle à juste titre que la protection conférée par le droit d’auteur peut s’appliquer aux œuvres des arts appliqués à l’industrie, ce qui peut inclure des emballages alimentaires.
Cette reconnaissance de principe n’est pas nouvelle et a notamment été réitérée par la Cour d’appel de Rennes, le 5 décembre 2023. A cette occasion, la cour a confirmé la protection par le droit d’auteur d’un emballage de sel sous forme de pot transparent en prenant en considération l’ensemble des éléments constituant son identité visuelle, et notamment sa charte graphique spécifique composée d’une association de couleurs et d’éléments visuels.2
Dans le cadre de l’affaire « Magnolia », la société demanderesse a listé une série de caractéristiques prouvant, selon elle, l’originalité de l’emballage argué de contrefaçon, tout en se référant à une décision rendue par le même tribunal le 13 août 2021 ayant reconnu cette originalité.
La partie défenderesse a pour sa part exposé l’existence sur le marché de nombreux modèles similaires à l’emballage « Magnolia », lesquels s’inscrivent dans la continuité de l’art de l’origami et plus particulièrement du « tato » japonais (petite enveloppe en papier confectionnée en origami).
Tout en rappelant que l’antériorité n’est pas un critère retenu pour apprécier l’originalité d’une œuvre, le tribunal a toutefois considéré qu’en l’espèce, cette antériorité rendait impossible la démonstration de l’empreinte de la personnalité de l’auteur de l’emballage « Magnolia », lequel est donc dépourvu d’originalité.
En motivant sa décision de la sorte, le tribunal semble faire référence à la notion de « fonds commun de l’art », non protégé par le droit d’auteur, et considérer que l’emballage « Magnolia » n’est qu’une simple illustration de l’art ancestral de l’origami sans originalité propre.
Cette solution aurait pu être différente si l’emballage argué de contrefaçon avait présenté, comme dans l’affaire jugée par la Cour d’appel de Rennes, des éléments graphiques spécifiques en plus de sa seule forme.
Pour rejeter les demandes de la société Aphinitea Corporation fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme économique, le tribunal s’appuie également sur l’existence d’un nombre important d’antériorités semblables appartenant au fonds commun des origamis et permettant d’écarter tout risque de confusion entre les sociétés concurrentes, mais également tout savoir-faire ou effort déterminé de la part de la société Aphinitea Corporation.
Ce jugement nous rappelle également que la reconnaissance, dans une décision antérieure, de l’originalité d’une œuvre ne suffit pas à ce que celle-ci soit automatiquement retenue dans le cadre d’une nouvelle procédure portant sur des faits distincts.
En l’espèce, le Tribunal judiciaire de Paris était d’autant plus légitime à reconsidérer l’originalité de l’emballage « Magnolia » dans la mesure où, dans la procédure de 2021 invoquée par la société Aphinitea Corporation, la partie défenderesse n’avait pas comparu et n’avait donc pas contesté les droits qui lui étaient opposés.
Toutefois, le principe selon lequel chaque juridiction est « tenue de se déterminer d’après les circonstances particulières du procès et non par une motivation générale faisant référence à des causes déjà jugées » constitue une règle générale reconnue par la Cour de cassation et doit donc s’appliquer quelles que soient les circonstances dans lesquelles les décisions antérieures ont été rendues.3
Quels sont les autres modes de protection envisageables pour un emballage alimentaire ?
Cette décision du Tribunal judiciaire de Paris met en lumière la difficulté de démontrer l’originalité d’une œuvre d’art appliqué lorsque celle-ci n’est constituée que d’une forme, en particulier lorsqu’elle emprunte à une pratique artistique ancestrale telle que l’origami.
Aussi, pour assurer la protection de ce type de création, les ayants-droits peuvent opter pour d’autres modes de protection.
Le fondement de la concurrence déloyale et/ou parasitaire est, comme nous avons pu l’observer dans cette décision, lui aussi incertain et nécessite la démonstration d’un risque de confusion et/ou d’un savoir-faire, d’efforts ou d’investissements particuliers qui auraient été indûment accaparés par un concurrent.
De tels critères semblent très difficiles à réunir lorsqu’il peut être opposé à celui qui les invoque l’existence de nombreuses antériorités présentes sur le marché.
L’exploitant peut également être tenté d’opter pour le dépôt d’un modèle, mais il faudra alors veiller à respecter les critères de protection que sont :
– la nécessité que les caractéristiques du modèle ne soient pas imposées exclusivement par la fonction technique du produit ;
– la nouveauté, c’est-à-dire le fait que le modèle n’ait pas été divulgué avant son dépôt ;
– le caractère propre, c’est-à-dire le fait que le modèle provoque chez l’observateur averti une impression visuelle d’ensemble différente de celle produite par tout modèle divulgué antérieurement au dépôt.
C’est ainsi qu’en 2006, la Cour d’appel de Paris a pu confirmer la validité du modèle d’emballage de jambon de la marque Herta, sans pour autant retenir les actes de contrefaçon allégués par la société exploitant cette marque.4
Dans notre cas d’espèce, faute de nouveauté et de caractère propre, l’emballage « Magnolia » ne pourrait faire l’objet d’un dépôt à titre de modèle.
Enfin, le recours à une marque tridimensionnelle pour protéger une œuvre d’art appliqué pourrait être envisagé.
La jurisprudence a tendance à rappeler qu’en matière de distinctivité « les critères d’appréciation du caractère distinctif d’un signe constitué par l’apparence du produit lui-même sont en principe les mêmes que pour toutes les autres formes de marques ».5
Pour autant offices et juridictions imposent des conditions supplémentaires afin d’apprécier le caractère distinctif de ce type de marques.
L’enregistrement d’une marque tridimensionnelle sera tout d’abord refusé si celle-ci est constituée uniquement de « la forme d’un produit présentant une ou plusieurs caractéristiques d’utilisation essentielles et inhérentes à la fonction ou aux fonctions génériques de ce produit ».6
De même, une demande de marque tridimensionnelle sera rejetée si la forme déposée est nécessaire à l’obtention d’un résultat technique, comme ce fut le cas pour le Rubik’s Cube.7
Voir nos articles à ce sujet ici et ici.
Enfin, si la forme concernée confère au produit qu’elle désigne sa valeur substantielle, c’est-à-dire qu’elle joue un rôle déterminant dans le choix du consommateur d’acquérir ledit produit, alors elle ne pourra être déposée au titre d’une marque tridimensionnelle.8
En l’espèce, on pourrait s’interroger sur la recevabilité du dépôt de l’emballage « Magnolia » sous forme de marque tridimensionnelle, étant entendu que le motif de refus qui pourrait être opposé résiderait probablement dans le fait que sa forme est nécessaire à l’obtention d’un résultat technique, bien que d’autres formes permettraient d’aboutir au même résultat.
Conclusion
Au regard de la jurisprudence actuelle, la protection d’une simple forme qui, nonobstant une possible recherche esthétique, répond avant tout à une finalité technique semble délicate.
Les droits d’auteurs, des marques et des dessins et modèles nécessitent en effet soit une originalité esthétique marquée soit, à minima, un caractère distinctif permettant au public de percevoir une forme comme une indication d’origine, et non comme la représentation habituelle des produits pour lesquels elle est déposée.
Lorsque la forme est exclusivement ou, à tout le moins, majoritairement dictée par des considérations techniques, le dépôt d’un brevet ou d’un certificat d’invention peut sembler adéquat, mais encore faut-il répondre à une exigence d’innovation technique, ce qui n’est généralement pas le cas lorsqu’une forme constitue la reprise ou la modernisation d’un savoir-faire préexistant.
Quant au parasitisme économique, celui-ci nécessite la démonstration d’efforts, d’une renommée ou d’investissements dont tirerait parti l’entité parasitaire, supposant que l’agent économique concerné devra démontrer plus qu’une simple reprise à son compte d’un savoir-faire existant pour invoquer un tel moyen en défense de ses intérêts.
Une telle réticence des offices et des juridictions à accorder une protection aux formes fonctionnelles, dénuées d’éléments graphiques venant les habiller et ne représentant pas une innovation technique particulière, se comprend aisément au regard du principe de liberté du commerce et de l’industrie, lequel s’oppose à une privatisation des outils de production et de commerce les plus basiques afin de préserver une concurrence la plus libre possible.
Robin Antoniotti
Avocat
(1) Tribunal Judiciaire de Paris, 3e chambre 1re section, 8 février 2024, n° 22/02992
(2) Cour d’appel de Rennes, 1ère Chambre, 5 décembre 2023, n° 21/01537
(3) Cour de cassation, Chambre commerciale, 8 juillet 2014, n°13-16.714
(4) Cour d’appel de Paris, 4e chambre section b, 7 avril 2006
(5) Cour de Justice de l’Union Européenne, 16/06/2015, T-654/13, § 20
(6) Cour de Justice de l’Union Européenne, 18 septembre 2014, aff. C-205/13, Hauck
(7) Tribunal de l’Union Européenne, 24 octobre 2019, T‑601/17
(8) Cour de Justice de l’Union Européenne, 23 avril 2020, C-237/19, Gömböc Kutató
12
décembre
2023
Délai de prescription de l’action en contrefaçon : la Cour de cassation ne lâche pas la bride
Author:
TAoMA
Dans un arrêt du 15 novembre 2023, la Cour de cassation se prononce sur la question du point de départ du délai de prescription de l’action en contrefaçon en présence d’un délit continu.
En 1985, l’artiste Frédéric Jager avait conçu pour le Musée du cheval vivant aux Grandes écuries de Chantilly, une sculpture monumentale de trois mètres de hauteur représentant trois chevaux dans une demi-vasque circulaire intitulée « Fontaine aux chevaux » ou « La Prueva ».
Après avoir eu connaissance de l’existence de reproductions illicites de son œuvre, l’artiste a lancé une procédure afin de déterminer leur origine et localisation.
C’est ainsi qu’a été découverte une reproduction exposée dans le Potager des Princes à Chantilly. Son caractère contrefaisant a été définitivement reconnu par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 17 décembre 2008.
En 2021, à la suite d’une tentative de règlement amiable infructueuse, l’artiste a finalement assigné la société le Potager des Princes et son gérant, en référé, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l’atteinte à ses droits de propriété intellectuelle.
Le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille ayant fait droit à ses demandes, la société Le Potager des Princes a interjeté appel devant la Cour d’appel de Douai. La Cour a infirmé l’ordonnance du juge des référés et rejeté l’ensemble des demandes de l’artiste au motif que son action était prescrite.
C’est dans ce contexte que Frédéric Jager a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.
Pour démontrer que l’action n’était pas prescrite, il a soutenu qu’en présence d’un délit continu (en l’occurrence constitué par la détention et l’exposition de l’exemplaire contrefait), le point de départ du délai de prescription se situait au jour de la cessation des actes contrefaisants.
La société Le Potager des Princes soutient quant à elle que le délai de prescription commençait à courir au jour où l’artiste a eu connaissance de la contrefaçon : au plus tard, le 15 octobre 2008. L’action était donc prescrite depuis le 16 octobre 2013.
En réponse, la Cour de cassation rappelle d’abord l’article 2224 du Code civil selon lequel « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »
La Cour reconnait que la présence de la statue litigieuse dans le Potager des Princes a été connue de l’artiste dès le dépôt du rapport d’expertise du 3 septembre 2004 et que son caractère contrefaisant a définitivement été reconnu par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 17 décembre 2008.
Ainsi, elle fixe le point de départ du délai au 17 décembre 2008 ; son expiration est donc intervenue le 17 décembre 2013.
L’auteur est désormais impuissant pour faire cesser l’exposition de cette statue contrefaisante dans le Potager des Princes.
Une interrogation demeure : pourquoi la Cour a-t-elle privilégié comme point de départ du délai la date à laquelle le caractère contrefaisant de l’œuvre a été définitivement reconnu, et non la date à laquelle l’artiste a eu connaissance de son existence ?
En tous les cas, cette décision clarifie les règles relatives à la prescription en matière de contrefaçon en présence d’un délit continu et oblige les demandeurs à engager au plus vite leurs actions contentieuses.
Alain Hazan
Avocat associé
Delphine Monfront
Avocat à la Cour
18
juillet
2023
Nestlé & AMPC : 0% de contrefaçon mais 100% de cacao !
La société AMCP commercialise le chocolat qu’elle fabrique sous forme de tablettes de dégustation sous la marque « Encuentro », l’emballage de ces produits s’appelle « Encuentro 70% Haïti », représentant une cabosse de couleur orange à reflets jaune apposée sur un fond uni couvrant la quasi-totalité de l’emballage.
Elle reproche à la société Nestlé la contrefaçon de droit d’auteur sur ses emballages et la concurrence déloyale, pour avoir reproduit les caractéristiques essentielles de son packaging dans sa tablette de chocolat « Incoa ».
Tout en retenant l’originalité du packaging, le Tribunal judiciaire de Paris rejette pourtant ses demandes le 13 avril 2023[1]
Le tribunal retient l’originalité du packaging « Encuentro 70% Haïti »
Même si certains éléments sont dictés par la fonction technique de l’emballage, et d’autres banals, ces éléments, pris dans leur ensemble, attestent d’une opposition entre une étiquette à la typographie d’imprimerie traditionnelle et une représentation stylisée, sous forme d’aquarelle, d’une cabosse de cacao accentuant ses couleurs naturelles orangée ou violette.
Les emballages sont présentés de façon lisse, avec des couleurs vives et des effets de dégradés et de reflets.
Le tribunal retient que cette présentation véhicule une atmosphère artisanale et sobre d’authenticité et de qualité, combinée de façon originale, avec une représentation graphique colorée pouvant évoquer un élément passionnel et la gourmandise associée au produit.
Le tribunal rejette le fondement de la contrefaçon
Le tribunal est ferme et indique que les éléments l’ayant mené à reconnaître l’originalité du packaging du demandeur n’existent pas pour la tablette Incoa de la société Nestlé, dont la version de la cabosse de cacao est épurée, simple, droite et sans reflets.
Par ailleurs, le tribunal rejette le fondement de la concurrence déloyale car le consommateur du chocolat Encuentro d’attention élevée ne pourra pas confondre des produits qui se distinguent par leurs marques, leurs prix et leurs qualités, la faute n’est donc pas démontrée.
En effet, le public pertinent, au cas d’espèce acheteur du chocolat Encuentro, est considéré comme recherchant un produit de qualité gustative et par sa composition, il dépensera donc un prix élevé pour acheter du chocolat, la tablette Encuentro étant vendue au prix de 7 à 8 euros. Le chocolat Encuentro est un chocolat haut de gamme, ciblant un public d’amateurs ou de connaisseurs et distribué dans un réseau de commerce au détail et spécialisé.
Le consommateur est donc considéré comme disposant d’un niveau d’attention élevée.
Au contraire, la tablette Incoa est un chocolat industriel ciblant un large public et commercialisée dans un réseau étendu de magasins de grande surface.
Il est donc peu probable que le public pertinent soit en situation de confondre les deux produits.
Cette position est assez surprenante dans la mesure où les tablettes de chocolat sont un produit ordinaire dans la consommation quotidienne et à destination du grand public, le degré d’attention du consommateur devrait être qualifié de moyen, comme cela a été jugé à propos de boissons rafraichissantes[2] par exemple.
L’attention plus élevée du consommateur est généralement retenue lorsque les produits sont spécifiques et onéreux comme les vins de Champagne[3].
Ici, c’est sans doute la qualité certaine du chocolat qui en fait un produit cher conduisant donc à considérer le consommateur qui va l’acheter comme ayant un niveau d’attention élevée.
Enfin, les fondements de parasitisme et pratiques commerciales trompeuses sont également écartés.
Nestlé et son chocolat ont encore de beaux jours devant eux…
Des questions sur vos droits d’auteur et leur protection ? Les équipes de TAoMA sont à votre disposition pour en discuter !
Emeline JET
Elève-avocate
Jean-Charles Nicollet
Associé – Conseil en Propriété Industrielle
[1] TJ Paris, du 13 avril 2023 n°21/09930
[2] TUE, 23 février 2022 Ancor Group GmbH c/ EUIPO
[3] Tribunal judiciaire de Paris, 3e chambre, 1e section, 29 juillet 2021, RG n° 19/13569
20
janvier
2023
Replay de l’évènement « Marketing d’influence, métaverse, NFT : nouveaux vecteurs de la contrefaçon ? »
Pour celles et ceux qui n’ont pas pu être là, un replay est à retrouver ci-dessous et sur la chaîne YouTube TAoMA Event ✨ 👇
L’occasion de remercier à nouveau nos brillantes intervenantes :
🎤 Delphine Sarfati – Directrice Générale de l’UNIFAB – Union des Fabricants
🎤 Constance Laennec-Cuny – Responsable Propriété Intellectuelle
🎤 Anne Messas – Avocate et Médiatrice, Associée et co-fondatrice de TAoMA Partners
🎤 Anne LAPORTE – Avocate chez TAoMA Partners et membre de TAoMA Influence , une offre de services spécifique créée et proposée par TAoMA Partners
Le prochain évènement TAoMA aura lieu en mars, on vous en dévoile plus bientôt ! Stay tuned ! 🤓
11
juillet
2022
Quand la comédie familiale tourne au drame pour les coauteurs d’une pièce de théâtre objet de multiples versions
Author:
TAoMA
La transformation des œuvres de l’esprit est source d’un contentieux judiciaire inépuisable. La Cour d’appel de Paris a récemment rappelé que les coauteurs d’une pièce de théâtre adaptée d’une œuvre composite, issue d’une œuvre préexistante, sont tenus de recueillir l’autorisation préalable de son auteur, peu importe que l’auteur de l’œuvre préexistante ait contribué à la création de la dernière version.
Un imbroglio juridique démêlé à la faveur de l’auteur de l’œuvre composite « Ma Belle-Mère, Mon Ex et Moi » !
– ACTE I –
La pièce « Ma Belle-Mère, Mon Ex et Moi » (V1) écrite en 2011 a fait l’objet en 2014 d’une seconde version, portant le même titre (V2). L’auteur de l’œuvre préexistante n’a pas participé à l’écriture de cette version mais indique « avoir consenti, une fois mis devant le fait accompli, au dépôt de celle-ci à la SACD (…) et à son exploitation ». En 2016, une troisième version voit le jour, intitulée « Ma Belle-Mère et Moi, 9 mois après » (V3), créée par trois coauteurs, dont l’auteur de l’œuvre initiale.
– ACTE II –
S’estimant lésé, l’auteur de la V2 qui n’a pas donné son autorisation préalable pour la création de la V3 a introduit une action en contrefaçon à l’encontre des coauteurs de cette dernière version. Les juges du fond ayant, en partie, accueilli cette demande (TGI de Paris, 11 octobre 2019, n°17/09967), la société de production et deux des trois coauteurs de la V3 ont interjeté appel de la décision.
– ACTE III –
Bien que la situation ne manque pas d’ironie, l’auteur de l’œuvre initiale ayant participé à la création de l’œuvre dans sa dernière version, la Cour d’appel de Paris est purement et simplement venue appliquer les principes du Code de la propriété intellectuelle protégeant les œuvres transformatrices et rappeler que le créateur d’une œuvre de l’esprit, fut-elle composite, jouit pleinement de ses droits d’auteur, comme tout auteur.
• Scène 1 : la V2 est une œuvre composite, dérivée de la V1
En application de l’article L. 113-2 du CPI aux termes duquel « est dite composite l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière » :
La Cour considère que l’auteur de la V2 démontre être à l’origine de choix arbitraires et d’apports originaux (portant sur 66% du texte global de la V1) révélant l’empreinte de sa personnalité notamment concernant : la trame de l’histoire relative à la grossesse des deux actrices, l’héritage conditionné à la naissance d’un enfant et plus généralement le caractère des personnages.
La Cour estime que la V2 « Ma Belle-Mère, Mon Ex et Moi » est donc une œuvre composite créée sans contribution de la part de l’auteur de l’œuvre préexistante, mais avec son autorisation, bénéficiant ainsi d’une protection au titre du droit d’auteur.
• Scène 2 : la V3 est une œuvre dérivée de la V2 et non de la V1
En application de l’article L. 113-4 du CPI aux termes duquel « l’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante » :
La Cour estime, à l’issue d’une analyse in concreto de la situation et d’un travail de comparaison, que la V3 se présente comme la suite logique et chronologique de la V2 et que les coauteurs de la V3 se sont manifestement inspirés des éléments clés de l’intrigue de la V2 et non de la version 1.
La Cour confirme que les coauteurs de la V3 auraient donc dû solliciter l’accord préalable de l’auteur de la V2 (ce qu’ils ont au demeurant tenté de faire, sans succès…).
– ACTE IV –
Les deux coauteurs de la V3 et la société de production, ont donc été condamné pour contrefaçon de droits d’auteur au paiement de la somme de 5.000 euros pour atteinte au droit moral de l’auteur de la V2 et de 20.000 euros en réparation de son préjudice matériel.
On notera que l’auteur de l’œuvre préexistante, mis devant le fait accompli pour autoriser l’œuvre dans sa version intermédiaire, n’est pas condamné pour son rôle mineur dans la création de la V3 : maigre consolation qui vient rappeler la force de la protection accordée par le droit d’auteur aux œuvres transformatrices.
– ACTE V –
Une affaire atypique en raison de la participation de l’auteur de l’œuvre préexistante à l’œuvre qualifiée de contrefaisante. Les droits de l’œuvre initiale ne l’emportent pas sur ceux de l’œuvre composite. La prudence est donc toujours de mise pour les créateurs qui entendent s’inspirer d’œuvres préexistantes.
Une affaire d’ex et de belles-mères qui n’a pas fini de faire parler…
Ludovic de Carne
Avocat à la Cour
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