Le papier peint fonce droit dans le mur !

Par une décision en date du 25 avril 2024, le Tribunal judiciaire de Paris a reconnu l’existence de droits d’auteur sur différents motifs de papiers peints créés par une artiste plasticienne. Cela étant, malgré la reconnaissance de ces droits d’auteurs, l’artiste a été déboutée de son action en contrefaçon initiée à l’encontre d’une société hollandaise qui proposait un papier peint prétendument contrefaisant1.

Les motifs de papiers peints peuvent bénéficier d’une protection par le droit d’auteur sous réserve de leur originalité.

Conformément aux dispositions du Code la propriété intellectuelle2, une œuvre de l’esprit peut revêtir différentes formes, dont notamment « 7° Les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie (…) ». Néanmoins, pour que cette œuvre de l’esprit bénéficie d’une protection par le droit d’auteur, encore faut-il qu’elle soit originale.

En l’occurrence, Madame G, artiste plasticienne, a créé une collection de papiers peints parmi lesquels un décor mural intitulé « White Spirit ». Toutefois, Madame G a eu la désagréable surprise de constater que son distributeur proposait à la vente un papier peint blanc produit par la société hollandaise Eijffinger BV qui, selon elle, présentait notamment des ressemblances avec son modèle emblématique.

Sur cette base, elle a assigné la société Eijffinger BV, notamment en contrefaçon de droit d’auteur, devant le Tribunal judiciaire de Paris.

Classiquement, la société Eijffinger BV s’est défendu en invoquant le défaut d’originalité des motifs de papiers peints invoqués et, partant, l’absence de protection par le droit d’auteur.

Le Tribunal judiciaire de Paris rejette ce moyen de défense et considère que les motifs de papiers peints sont originaux. En particulier, il est jugé que l’artiste a superposé de manière arbitraire des formes ou modules graphiques monochromes découpées au cutter dans du papier, ce qui confère à l’ensemble une impression en trois dimensions.

Le Tribunal judiciaire de Paris ajoute que les caractéristiques telles que citées ci-dessus ne se réduisent pas à une simple idée ou à un simple savoir-faire mais traduisent manifestement l’empreinte de la personnalité de l’auteur : « l’illusion d’optique ainsi créée par la mise en relief des formes géométriques découpées et le jeu d’ombre portée évoquent la représentation d’une sculpture de papier, dans une esthétique qui s’avère singulière s’agissant d’une tapisserie murale ».

Le modèle de papier peint « White Spirit », se voit ainsi accorder une protection au titre du droit d’auteur.

La société Eijffinger BV ne se rend toutefois pas coupable d’actes de contrefaçon des motifs de papiers peints de Madame G

Si l’originalité des motifs de papiers peints est admise, il en va différemment de la contrefaçon de ces derniers par la société Eijffinger BV.

En effet, après une analyse détaillée des modèles en cause, le Tribunal judiciaire de Paris considère que les caractéristiques essentielles du modèle de papier peint « White Spirit » ne se retrouvent pas au sein des modèles argués de contrefaçon.

Selon le Tribunal judiciaire de Paris, les modèles litigieux ne représentent pas une superposition, sur différents niveaux, de formes ou modules graphiques découpés dans du papier et superposés pour restituer une impression visuelle de profondeur en trois dimensions.

Partant, la contrefaçon n’est pas caractérisée et Madame G est déboutée de ses demandes.

Il convient de noter que Madame G est également déboutée de ses autres demandes, notamment sur la base de la concurrence déloyale et du parasitisme. De même, Madame G se voit refuser une protection au titre du droit d’auteur de ses autres modèles eu-égard à leur absence d’originalité.

Cette décision rappelle, une fois de plus, les conditions de protection d’une œuvre quelle qu’elle soit, par le droit d’auteur. Toutefois, si cette protection est reconnue, encore faut-il que les actes de contrefaçon soient caractérisés, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

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Baptiste Kuentzmann
Conseil en Propriété Industrielle

1) Tribunal judiciaire de Paris, 3ème chambre, 1ère section, 25 avril 2024, n° 23/04554
2) Article L112-2 du Code de la propriété intellectuelle